En véritable boule d’énergie, Françoise a des choses à dire. « Je suis engagée dans les mots mais aussi les actions, j’aime quand les choses bougent ! Disons que je défends mes opinions », annonce Françoise Crété, en préambule. Les présentations sont faites. Le décor est planté.

Présidente de la Chambre d’agriculture de la Somme depuis 2019, Françoise Crété est une femme d’action. Pragmatique et pugnace, elle aime le quotidien qui bouge et les idées qui prennent racine et s’épanouissent avec leur temps.

Issue d’une fratrie de 7 enfants, elle grandit au sein de la ferme familiale dans le Pas-de-Calais. Françoise Crété se marie « très jeune » à un exploitant agricole de Camps en Amiénois. Elle réalise son rêve de devenir agricultrice à son tour. « J’ai eu la chance dans ma vie d’être très proche de mon grand-père, un homme remarquable, un agriculteur ; puis j’ai encore eu de la chance quand mon père m’a laissée faire des études agricoles alors que ce n’était pas dans l’air du temps et puis par une belle-mère battante pour qui « tout va toujours aller ». »

Agricultrice, pas « juste » femme d’agriculteur

À 26 ans, elle assume ses trois enfants et le travail au sein du GAEC qu’ils ont créé avec ses beaux-parents. Pas question d’être femme d’agriculteur. Elle est agricultrice elle-aussi. Leurs 70 vaches produisent 600 000 litres de lait chaque année.

En parallèle de ça, son mari cultive des céréales, des pommes de terre et des betteraves. « Ce travail ne m’a jamais empêchée de jouer pleinement mon rôle de maman et d’être intégrée pleinement dans la société : association des parents d’élèves, catéchèse… Je passais mon temps à prendre des douches et à me changer pour ne pas sentir la vache en réunion. » s’amuse-t-elle encore aujourd’hui.

Un engagement naturel

C’est ainsi, de fil en aiguille, que Françoise Crété arrive au « syndicat » (NDLR : comprendre la FDSEA). Elle prend d’abord une présidence au niveau cantonal mais très vite, on apprécie son caractère volubile et son franc-parler. Elle prend alors des responsabilités au niveau départemental.

« Le syndicalisme, c’est vraiment intéressant, c’est du bénévolat, des rencontres et surtout beaucoup de convivialité, analyse Françoise Crété. J’ai toujours aimé travailler en collectif, réfléchir et prendre des décisions pour faire avancer les choses parce que c’est ça, être vivant. Il faut que nous communiquions sur notre métier. Nous avons trop laissé les autres parler de nous. » Elle énumère : les progrès scientifiques et technologiques comme les FIV qu’elle pratiquait sur ses vaches déjà à la fin des années 80, le robot de traite qui réduit les risques de mammites, la méthanisation, l’agrivoltaisme…

« Il faut se sortir de l’idée que tout ce qui est nouveau ou grand est dangereux. Tous les produits qui sortent de chacune de nos fermes sont des produits de qualité et répondent à la réglementation qui est particulièrement exigeante. Quel que soit le type de ferme, elle nécessite des investissements, une main d’œuvre qualifiée et un savoir-faire pointu. »

Une suite logique

Son engagement à la Chambre d’agriculture de la Somme date de son installation, ou presque. « J’ai toujours travaillé avec le conseil de la Chambre. Elle apporte un conseil neutre aux agriculteurs et suit toutes les typologies d’agricultrices et d’agriculteurs ; dans leur quotidien de jeune installé, dans leur itinéraire technique, dans leur changement de pratiques, dans leurs démarches administratives et réglementaires, dans leur projet de diversification… » Elle en est élue présidente au début de l’année 2019.

Françoise CRÉTÉ
Présidente de la Chambre d’Agriculture
Tél – 06 08 35 62 71
[email protected]

Une agriculture résiliente

« Je me plaisais bien à la fédé, la revendication me va bien, mais être élue à la Chambre est un autre défi, car cela me permet de co-contruire avec les différents acteurs du territoire. Notre rôle est de rendre applicable les idées du Ministère et de permettre aux jeunes de s’installer. Pour 3 anciens qui arrêtent, il n’y a que deux jeunes qui s’installent. C’est trop peu. Notre profession a besoin d’entrepreneurs qui osent. Nous voulons une agriculture diversifiée mais résiliente ; une agriculture qui tienne la route sur le long terme. Il faut que nous soyons conscients du territoire que nous avons. Dans la Somme, 70% du territoire est cultivé. Nous avons la Baie, à l’ouest, qui est si particulière. Le Vimeu, terre d’élevage et tellement riche. Une zone intermédiaire qui n’est pas si mal et un Santerre qui est une véritable terre d’exception avec un limon profond et de magnifiques réserves d’eau. »

Une gestion territoriale de l’eau

L’une des préoccupations majeures de Françoise Crété, c’est l’eau. « Pour la gestion de l’eau, nous devons avoir une vision au niveau de l’ensemble du Bassin Artois Picardie. Nous devons prendre ce sujet à bras-le-corps ! En 2023, nous avons connu 6 mois de sécheresse et 6 mois de trop plein durant lesquels nous avons dû rejeter de l’eau douce dans la mer. Trouvons des modèles pour étaler le plus possible l’eau sur le territoire ou mettons en place des réserves le long du Canal Seine-Nord Europe par exemple. La ressource en eau devient l’enjeu de demain au regard des conditions climatiques actuelles. L’agriculture a des besoins en hausse avec une répartition différente des précipitations et moins d’eau au printemps-été. Il est donc indispensable de garder un accès à la ressource d’eau pour garantir une alimentation.

La Chambre participe aux discussions départementales et régionales sur la gestion de l’eau en période de crise au travers des arrêtés sécheresse, et à la définition des arrêtés de gestion de crise. Notre souci est de répartir équitablement la ressource en eau auprès des différents utilisateurs : industriels, agriculteurs et consommateurs ».